Russie : l’agence spatiale Roskosmos dans la tourmente

Avec des milliards envolés, des responsables en prison et un dirigeant en fuite à l’étranger, le secteur spatial russe se trouve au cœur d’un scandale de détournements de fonds astronomiques qui entachent les ambitions de grandeur retrouvée de la Russie dans le domaine aérospatial.
A la mi-mai, le chef du Comité d’enquête Alexandre Bastrykine a déclaré à l’agence Ria Novosti qu’après cinq mois d’enquêtes, toujours en cours, il était déjà possible d’affirmer que «des milliards avaient été volés» au sein du conglomérat public Roskosmos, qui regroupe les entreprises spatiales du pays.
Un peu plus tôt, courant avril, Iouri Iaskine, le directeur général de l’Institut des recherches de la construction des équipements spatiaux, a quitté la Russie pour un pays d’Europe depuis lequel il a annoncé sa démission.
Un audit venait d’être lancé au sein de son entreprise, qui participe à la mise au point du système de navigation satellitaire russe Glonass, censé concurrencer le GPS américain, et il semble qu’il craignait la découverte de malversations.
Presque toutes les entreprises principales du secteur spatial russe, dont les constructeurs de fusées Khrounitchev et Progress, ont été touchées par des scandales financiers, aboutissant parfois à des peines de prison pour escroquerie à grancde échelle. Glonass et la construction d’un nouveau cosmodrone, Vostotchny, en Extrême-Orient russe, censé remplacer Baïkonour, au Kazakhstan, sont les deux projets majeurs qui ont pâti des détournements.
Ces scandales ont porté atteinte aux ambitions de la Russie de redresser son agence spatiale et ainsi maintenir sa réputation et son rang à l’échelle mondiale, une question de prestige pour le Kremlin dans un contexte de nouvelle guerre froide avec les Etats-Unis.
Dans les années 1990, après la chute de l’URSS, l’industrie spatiale russe faisait face à d’importants soucis financiers, ce qui ne l’a pas empêché de fabriquer le premier module de la Station Spatiale Internationale lancée en 1998.
Paradoxalement, c’est la résolution de ses soucis qui a initié la corruption. L’afflux d’argent dans les caisses grâce à des contrats commerciaux étrangers a entraîné le début des fraudes et l’arrêt de la recherche spatiale.